En raison de notre proximité des États-Unis ou par souci de diversification géographique, plusieurs investisseurs ont des placements en devises américaines dans leur portefeuille. Comme pour tous les placements, les actions américaines font face au risque du marché et une analyse judicieuse des titres convoités est nécessaire afin de minimiser le plus possible l’intégration de mauvais titres dans notre portefeuille. Cependant, même en choisissant les meilleurs titres disponibles et en diversifiant de manière optimale leurs portefeuilles de titres américains, les investisseurs demeurent toujours exposés au risque de fluctuation de la devise américaine par rapport à la devise canadienne. Ce risque peut avoir des conséquences importantes sur le rendement total obtenu à la liquidation des titres.
Le risque de devise pour un investisseur vient de la différence entre le taux de change payé au moment de l’achat des titres et celui reçu lors de la vente des titres. Par exemple, imaginons un investisseur qui achète 1 000 parts du fonds négocié en bourse (FNB) SPDR® S&P® 500 (SPY) à 300 $ US la part pour une valeur totale de 300 000 $ US alors que le taux de change USD/CAD se négocie au taux de 1,32. Ce taux implique que l’investisseur devra payer une somme de 396 000 $ CA pour faire l’acquisition des 1 000 parts SPY. Au moment de liquider sa position, outre le fait qu’il puisse demeurer stable, le taux de change USD/CAD aura soit augmenté, soit baissé. Le tableau suivant illustre les résultats découlant d’une hausse et d’une baisse du taux de change en fonction d’un prix des parts SPY qui n’aurait pas changé.
Position | Taux de change USD/CAD | Total en $ CA |
Achat de 1 000 parts SPY à 300 $ US | 1,32 | 396 000 |
Scénario 1 | ||
Vente de 1 000 parts SPY à 300 $ US un an plus tard | 1,28 | 384 000 |
Résultat pour le scénario 1 | Perte de 12 000 $ CA (-3,03 %) | |
Scénario 2 | ||
Vente de 1 000 parts SPY à 300 $ US un an plus tard | 1,36 | 408 000 |
Résultat pour le scénario 2 | Profit de 12 000 $ CA (+3,03 %) |
À la lumière des résultats du tableau précédent, nous pouvons constater que le risque pour l’investisseur vient d’une baisse de la valeur du $ US puisqu’il recevra moins de $ CA pour ses 1 000 parts SPY qui ont auront été revendues au même prix en $ US.
Heureusement, la Bourse de Montréal offre aux investisseurs des options sur le dollar américain (USX)[1] qui leur permettent de se couvrir contre le risque de change. Chaque contrat d’options USX porte sur une somme de 10 000 $ US. Les primes sont cotées en cents canadiens par unité de dollar américain. Ainsi, l’investisseur aurait pu acheter 30 contrats d’options de vente USX afin de se couvrir contre une baisse du taux de change USD/CAD.
Imaginons une investisseuse qui décide d’acheter, le 30 octobre 2019, 1 000 actions du FNB SPY à 304,14 $ US à la fermeture du marché pour un total de 304 140 $ US alors que le taux de change $ US/$CA coté à 1,3154[2]. Par conséquent, elle devra débourser 400 065,76 $ CA pour acquérir ses actions en devises américaines. Comme nous avons pu le constater précédemment, le risque d’une telle position vient d’une baisse du dollar américain. Ainsi, elle devra acheter des options de vente pour obtenir une couverture adéquate contre ce risque. Il existe plusieurs façons de calculer le nombre de contrats qu’elle devra acheter pour se couvrir. Une des manières les plus simples consiste à diviser la valeur des actions par la taille du contrat d’options et à arrondir le résultat à l’entier le plus près. Dans ce cas, elle devra donc acheter 30 contrats d’options de vente pour couvrir adéquatement son risque de change. Elle pourrait choisir des options à parité, soit des options ayant un prix de levée presque à égalité avec le taux de change actuel, mais elle est prête à assumer un risque de change limité à 2 %.
Ainsi, avec un taux de change de 1,3154, l’investisseuse achèterait donc des options de vente USX hors jeu près du taux de 1,2891 .
L’investisseuse sait qu’elle aura besoin de liquider sa position au mois de juin 2020 pour faire face à certaines obligations financières. Elle décide alors d’acheter 30 contrats d’options de vente USX échéant le 19 juin 2020 et ayant un prix de levée de 129 cents canadiens cotés à 1,16 cent canadien par dollar américain, pour un total de 3 480 $ CA.
Tableau 2 : Résultats de la couverture en fonction de différents taux de change à l’échéance du 19 juin 2020 et d’un prix stable du SPY
Valeur du placement en $ US | Taux USD/CAD | Valeur du placement en $ CA | Coût des options de vente en $ CA | Valeur des options de vente en $ CA | Valeur du placement couvert en $ CA |
304 140 | 1,34 | 407 548 | 3 480 | 0 | 404 068 |
304 140 | 1,33 | 404 506 | 3 480 | 0 | 401 026 |
304 140 | 1,32 | 401 465 | 3 480 | 0 | 397 985 |
304 140 | 1,31 | 398 423 | 3 480 | 0 | 394 943 |
304 140 | 1,30 | 395 382 | 3 480 | 0 | 391 902 |
304 140 | 1,29 | 392 341 | 3 480 | 0 | 388 861 |
304 140 | 1,28 | 389 299 | 3 480 | 3 000 | 388 819 |
304 140 | 1,27 | 386 258 | 3 480 | 6 000 | 388 778 |
304 140 | 1,26 | 383 216 | 3 480 | 9 000 | 388 736 |
304 140 | 1,25 | 380 175 | 3 480 | 12 000 | 388 695 |
Comme nous pouvons le constater dans le tableau précédent, l’investisseuse est protégée contre une baisse du taux de change tout en tirant avantage d’une hausse puisque la valeur minimale du portefeuille est à son niveau plancher aux alentours de 388 700 $ CA en cas de baisse du dollar américain sous le niveau de 1,29, alors que la valeur du portefeuille s’accroît en relation avec une hausse au-dessus de ce niveau. Dans cet exemple, nous n’avons pris en compte que la variation du taux de change en gardant la valeur des parts SPY fixe. En réalité, au moment de liquider sa position le 19 juin 2020, la valeur des parts SPY aura changé pour le meilleur ou pour le pire. Ainsi, la prise de position sur les options de vente USX ne couvre l’investisseuse que contre le risque de change et non contre le risque de marché. Par conséquent, pour obtenir une couverture contre le risque de marché, il lui faudrait acheter des options de vente portant sur les parts SPY.
Veuillez prendre note que les options USX ne sont pas exclusivement des outils pour couvrir le risque de change. Toutes les stratégies habituellement utilisées par les investisseurs dans le marché des options sur actions peuvent être utilisées de la même manière avec les options USX. Ainsi, un investisseur qui anticipe une hausse du taux de change pourra acheter des options d’achat USX afin d’en tirer profit. Pour de plus amples informations sur les options USX, veuillez vous diriger vers le lien suivant : https://app.tmx.com/usx-fr/
Bonnes opérations et bonne semaine!
[1] Source : Bourse de Montréal, (https://m-x.ca/produits_options_devises_fr.php)
[2] Source : TC2000, Worden Brothers, Inc.
Les stratégies décrites dans le présent blogue ne sont présentées qu’à des fins d’information et de formation. Elles ne doivent pas être interprétées comme étant des recommandations d’acheter ou de vendre quelque valeur mobilière que ce soit. Comme toujours, avant de mettre en œuvre des stratégies sur options, assurez-vous d’être à l’aise avec les scénarios proposés et d’être prêt à en assumer tous les risques.
Président
Corporation Financière Monetis
Martin Noël a obtenu un MBA en services financiers de l'UQÀM en 2003. La même année, il a reçu le Brevet de l'Institut des banquiers canadiens et la Médaille d'argent pour ses efforts remarquables dans le cadre du Programme de formation bancaire professionnelle. Monsieur Noël a commencé sa carrière dans le domaine des instruments dérivés en 1983 à titre de mainteneur de marché sur options, sur le parquet de la Bourse de Montréal, pour le compte de diverses firmes de courtage. Il a également occupé le poste de spécialiste sur options et, par la suite, de négociateur indépendant. En 1996, monsieur Noël est entré au service de la Bourse de Montréal à titre de responsable du marché des options où il a contribué au développement du marché canadien des options. En 2001, il a participé à la création de l'Institut des dérivés de la Bourse de Montréal où il a œuvré à titre de conseiller pédagogique. Depuis 2005, Martin est chargé de cours à l'UQÀM où il enseigne un cours sur les instruments dérivés au deuxième cycle. Depuis mai 2009, il est président à temps plein de la CORPORATION FINANCIÈRE MONÉTIS, une société active dans la négociation professionnelle et en communication financière. Martin agit comme collaborateur régulier en matière d’options pour la Bourse de Montréal.