Concepts
4

La parité call-put : comment transformer ses positions

Martin Noël
15 mai, 2017
7085 Lectures
0 Commentaires
Lecture en 11 minutes
La parité call-put : comment transformer ses positions

On m’a déjà fait la remarque, et vous aussi avez sûrement déjà entendu parler du fait que la vente d’options de vente couvertes (cash secured puts) était une stratégie très risquée. N’est-ce pas ? On vous aura alors expliqué que la principale raison est que vous pourriez être obligé d’acheter le titre même s’il venait à faire faillite. Vu comme ça, c’est vrai que cela peut faire peur. En effet, qui voudrait acheter un titre à un prix élevé alors qu’il ne vaut plus rien ? Car c’est bien ce que la vente d’options de vente couverte nous oblige à faire : être dans l’obligation d’acheter la valeur sous-jacente au contrat si le détenteur exerce son droit de vendre.
Par conséquent, si à l’échéance le titre est inférieur au prix de levée, le détenteur exercera son droit de vendre les actions, et nous serons alors forcés d’acheter les actions à perte. Le risque de perte est donc bien réel. Mais qu’en est-il de la vente d’options d’achat couvertes, pourriez-vous répliquer ? La plupart du temps lorsque je pose cette question, on me répond que cette stratégie est tout à fait adéquate, car elle permet de générer un revenu supplémentaire, par la vente des options d’achat, et d’obtenir une protection plus ou moins importante contre une baisse potentielle. Et ils n’ont pas tort ! Mais qu’en est-il du risque lié à la faillite du titre ? On me répond souvent, que ce risque est minime et que malgré tout il existe pour tous les titres que nous détenons. Encore une fois, ils n’ont pas tort. Mais pourquoi alors ce risque semble-t-il être plus important pour la vente d’options de vente couvertes que pour la vente d’options d’achat couvertes ? Question de perception sans doute, car en réalité, ces deux stratégies sont en tous points identiques comme vous pouvez le constater sur les graphiques suivants.

 

Vente d’options d’achat couvertes

Vente d’options d’achat couvertes :

Détention de 100 XYZ à 100 $ et vente de 1 XYZ 100 Call à 1,50 $

Vente d’options de vente couvertes

Vente d’options de vente couvertes :

Vente de 1 XYZ 100 Put à 1,50 $

En effet, les deux stratégies ont toutes les deux le même profil de profits et pertes. Par conséquent, elles contiennent le même risque et le même profit potentiels. En montrant ces deux graphiques à nos interlocuteurs, nous pouvons donc leur prouver que la vente d’options de vente couverte n’est pas plus risquée que la vente d’options d’achat couvertes. Voilà une histoire réglée.

Ce que nous venons d’observer, c’est qu’il est possible de transformer une position en une autre. Ainsi, lorsqu’on détient des actions dans notre portefeuille, on peut les transformer en autre chose en ajoutant une position d’options. Ainsi, dans le cas que nous venons de voir, on transforme notre position d’actions en vente d’options de vente couverte, en vendant une option d’achat. Cela est dû à un principe fondamental en matière d’évaluation d’options, et c’est la parité call-put. Selon ce principe, il est possible de transformer une option d’achat en option de vente, et vice-versa*.

Examinons le cas suivant. Si, au lieu de vendre une option d’achat, nous ajoutions l’achat d’une option de vente. Notre position serait maintenant équivalente à la détention d’une option d’achat. En effet, notre potentiel de profit demeurerait intact alors que notre perte en cas de baisse serait maintenant limitée grâce à l’achat des options de vente. Nous aurions alors le même profil de profits et pertes que celui de la détention d’une option d’achat comme nous pouvons l’observer sur les graphiques suivants.

Détention du titre et achat d’une option de vente

Détention du titre et achat d’une option de vente :

Détention de 100 XYZ à 100 $ et achat de 1 XYZ 100 Put à 1,50 $

Achat d’une option d’achat

Achat d’une option d’achat :

Achat de 1 XYZ 100 Call à 1,50 $

 

Comme nous pouvons le constater, les deux positions ont le même profil de profits et pertes, soit un potentiel de profit à la hausse illimité et une perte limitée en cas de baisse. Ces deux façons de transformer une position en une autre que nous venons de voir ne sont pas les seules. Il existe une multitude de permutations qui permettent de transformer une position en une autre. Tout ce qu’il suffit de faire c’est de faire un peu d’algèbre à l’aide de la formule de la parité call-put suivante :

Parité call-put
c + VA(K) = p + S

c = call
VA(K) = valeur actuelle du prix de levée
p = put
S = valeur du sous-jacent

Afin de simplifier les opérations, nous omettrons d’inclure la variable VA(K). Ainsi la formule devient,
c = p + S

Comme nous l’avons vu précédemment, une option d’achat est bien égale à la détention du titre (S) et d’une option de vente (p).

 

Essayons quelques permutations.

p = c – S

Une option de vente est ainsi obtenue par l’achat d’une option d’achat (c) et la vente à découvert du titre (- S).

-p = -c + S

Dans ce cas-ci, comme nous l’avons vu plus haut, la vente d’une option de vente (-p) résulte de la vente d’une option d’achat (-c) et de la détention du titre (S).

-c = -p – S

La vente d’une option d’achat (-c) peut être répliquée par la vente d’une option de vente (-p) et la vente à découvert du titre (-S).

 

 

Plusieurs autres permutations sont possibles, et vous pourrez les essayer toutes à votre discrétion. C’est ce principe qui permet de garder le marché des options en équilibre. Ainsi, si les options d’achat sur un prix de levée en particulier et une échéance donnée augmentaient exagérément, il serait alors possible d’acheter à la fois les options de vente correspondantes et les actions, et de vendre les options d’achat pour répondre à la demande. Ces opérations dites d’arbitrage permettent alors de garder l’ensemble de toutes les options inscrites dans une classe d’options donnée dans une fourchette de prix qui tient compte de l’offre et de la demande.

 

*Veuillez prendre note que pour les fins de cet article, nous examinons la parité call-put en fonction d’options de style européen, soit des options qui ne peuvent être exercées qu’à l’échéance. Pour les options européennes, la parité call-put est parfaite alors que pour les options américaines, soit des options qui peuvent être exercées avant l’échéance, cette relation est imparfaite car il est alors possible que l’option d’achat soit exercée avant l’option de vente, et vice versa. Ce qui veut dire que les options d’achat et les options de vente de style américain ont le potentiel d’avoir des dates d’échéance différentes, ce qui rend la parité call-put à ce moment-là inopérante. Par conséquent, veuillez considérer cet article comme une démonstration du principe général plutôt que comme une démonstration académique. Nous reviendrons sur l’exercice anticipé des options américaines dans un prochain article.

Bonnes transactions et bonne semaine !

 

Les stratégies présentées dans le cadre de cette chronique ne le sont qu’à titre d’information et de formation et ne doivent pas être interprétées comme étant des recommandations pour acheter ou vendre toutes valeurs mobilières. Comme toujours, avant de mettre en place des stratégies d’options assurez-vous d’être à l’aise avec les scénarios proposés et d’être prêts à en assumer tous les risques.

Martin Noël
Martin Noël http://lesoptions.com/

Président

Corporation Financière Monetis

Martin Noël a obtenu un MBA en services financiers de l'UQÀM en 2003. La même année, il a reçu le Brevet de l'Institut des banquiers canadiens et la Médaille d'argent pour ses efforts remarquables dans le cadre du Programme de formation bancaire professionnelle. Monsieur Noël a commencé sa carrière dans le domaine des instruments dérivés en 1983 à titre de mainteneur de marché sur options, sur le parquet de la Bourse de Montréal, pour le compte de diverses firmes de courtage. Il a également occupé le poste de spécialiste sur options et, par la suite, de négociateur indépendant. En 1996, monsieur Noël est entré au service de la Bourse de Montréal à titre de responsable du marché des options où il a contribué au développement du marché canadien des options. En 2001, il a participé à la création de l'Institut des dérivés de la Bourse de Montréal où il a œuvré à titre de conseiller pédagogique. Depuis 2005, Martin est chargé de cours à l'UQÀM où il enseigne un cours sur les instruments dérivés au deuxième cycle. Depuis mai 2009, il est président à temps plein de la CORPORATION FINANCIÈRE MONÉTIS, une société active dans la négociation professionnelle et en communication financière. Martin agit comme collaborateur régulier en matière d’options pour la Bourse de Montréal.

410 articles
0 commentaires

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.

Défiler vers le haut