Gestion de risque
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Utiliser les options en période d’incertitude sur les marchés

Martin Noël
7 juillet, 2020
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Utiliser les options en période d’incertitude sur les marchés

En période d’incertitude sur les marchés comme en ce moment, de nombreux investisseurs cherchent à utiliser les options pour se protéger. Si les marchés ont effacé une bonne partie des pertes enregistrées ces derniers mois[1], le scénario d’une nouvelle baisse qui pourrait mener à des creux encore plus bas que ceux observés récemment n’est toujours pas exclu. La volatilité[2] élevée que nous connaissons actuellement rend le coût des options plus élevé qu’avant la crise. La volatilité mesure la dispersion des rendements autour de leur moyenne sur une période donnée. Pour simplifier, on peut dire qu’elle mesure la propension du cours d’un titre à fluctuer sur une période donnée. Plus la volatilité d’un titre est élevée, plus le cours de celui-ci peut augmenter ou baisser fortement. C’est donc une mesure du risque auquel on s’expose lorsque l’on achète des titres comme des actions. À partir du prix des options, il est possible de déduire les anticipations des investisseurs à l’égard de la volatilité future. C’est ce qu’on appelle la volatilité implicite[3]. Ainsi, un titre étant coté à 50 $ et ayant une volatilité annuelle de 20 % verrait son cours fluctuer jusqu’à concurrence de 20 % à la hausse ou à la baisse dans 68,2 % des observations sur une année[4]. Ce qui veut dire que 68,2 % de toutes les observations se situeront entre 40 $ et 60 $. Plus la volatilité est élevée, plus cet intervalle s’accroît. Ainsi, comme le risque de perte est accru pour un titre ayant une volatilité élevée, la demande d’options de vente correspondantes est aussi élevée chez les investisseurs. Cela fait donc augmenter la valeur de ces options.

 

Se protéger au moyen des options

L’achat d’options de vente est la stratégie la plus simple pour se protéger contre une baisse. Il suffit de choisir le prix de levée et le nombre de contrats désirés pour se protéger contre une baisse du cours des titres détenus en deçà du prix de levée, et ce, jusqu’à l’échéance des options. Ainsi, un investisseur qui voudrait limiter une perte potentielle à 10 % à l’égard des actions qu’il détient et qui sont cotées à 50 $ pourrait choisir des options de vente ayant un prix de levée de 47 $ qui se négocient à 2 $ par action. Supposons que le cours de l’action est de 40 $ à l’échéance des options de vente, ce qui représente une perte de 20 % ([40 $ – 50 $] ÷ 50 = -20 %). Dans ce cas, l’investisseur a le droit de vendre 100 actions par contrat au prix de 47 $, duquel on doit déduire la prime payée de 2 $, pour une vente effective à 45 $. Cela représente une perte exactement égale à 10 % ([50 $ – 45 $] ÷ 50 $ = 10 %). Maintenant, supposons que l’investisseur, au lieu de vouloir se protéger contre une baisse de 10 %, estime plutôt que l’action ne perdra pas plus de 10 % de sa valeur et qu’il soit prêt à en subir les conséquences, le cas échéant.

 

Établir un écart vertical baissier à l’aide d’options de vente

Tout d’abord, définissons ce qu’est un écart vertical. Il y a plusieurs catégories d’écarts : les écarts verticaux, horizontaux et diagonaux. Nous ne traiterons que de l’écart vertical dans notre exemple. Un écart vertical implique l’achat d’une option et la vente simultanée d’une autre option de même type (option d’achat ou option de vente), chacune ayant des prix de levée différents, mais la même échéance. La prime encaissée pour l’option vendue réduit le coût de l’option achetée. Par conséquent, l’écart permet de réduire le coût de la couverture contre un risque spécifique.

Reprenons l’exemple précédent où l’action est cotée à 50 $, mais en supposant que l’investisseur, dans ce cas-ci, estime que le cours ne baissera pas en deçà de 45 $. Il effectue alors les opérations suivantes sur les options de vente disponibles :

Achat d’options de vente au prix de levée de 50 $ contre une prime de 4 $ (débit)

Vente d’options de vente au prix de levée de 45 $ contre une prime de 1 $ (crédit)

Le coût total de la stratégie est de 3 $ par action, ou 300 $ par contrat (3 $ × 100 actions par contrat). Grâce à cette stratégie, l’investisseur est protégé contre une baisse jusqu’à 45 $, mais il subira une perte à un cours inférieur. Imaginons des cas où le cours de clôture est exactement de 45 $ et de 40 $ à l’échéance.

 

Cours de clôture de 45 $

Si le cours de clôture de l’action est de 45 $ à l’échéance, l’investisseur perdra 5 $ par action détenue (50 $ – 45 $), mais la stratégie d’écart vertical baissier lui procurera un profit de 2 $ par action. En effet, à un cours de 45 $, les options de vente ont la valeur suivante :

Options de vente au prix de levée de 50 $ = 5 $ (prix de levée de 50 $ – cours de l’action de 45 $)

Options de vente au prix de levée de 45 $ = 0 $ (prix de levée de 45 $ – cours de l’action de 45 $)

On constate donc que l’écart a une valeur de 5 $ par action. Or, comme l’investisseur a payé 3 $ par action, le profit total de l’écart est donc de 2 $ par action (5 $ – 3 $). Ainsi, au bout du compte, l’investisseur enregistre une perte de 3 $ (-6 %) au lieu de 5 $ (-10 %).

 

Cours de clôture de 40 $

Si le cours de clôture de l’action est de 40 $ à l’échéance, l’investisseur perdra 10 $ par action détenue (50 $ – 40 $), mais la stratégie d’écart vertical baissier lui procurera tout de même un profit 2 $ par action. En effet, à un cours de 40 $, les options de vente ont la valeur suivante :

Options de vente au prix de levée de 50 $ = 10 $ (prix de levée de 50 $ – cours de l’action de 40 $)

Options de vente au prix de levée de 45 $ = 5 $ (prix de levée de 45 $ – cours de l’action de 40 $)

On constate donc que l’écart a toujours une valeur de 5 $ par action. Or, comme l’investisseur a payé 3 $ par action, le profit total de l’écart est donc de 2 $ par action (5 $ – 3 $). Ainsi, au bout du compte, l’investisseur enregistre une perte de 8 $ (-16 %) au lieu de 10 $ (-20 %).

 

Conclusion

En conclusion, l’utilisation de l’écart vertical a permis de réduire la perte de la position sur actions de l’investisseur en partie seulement. L’écart vertical baissier établi à l’aide des options de vente permet à un investisseur qui ne s’attend pas à une forte baisse du cours de la valeur sous-jacente d’obtenir une protection limitée à moindre coût. Si l’investisseur est convaincu qu’une forte baisse se produira et qu’il veut toujours garder ses actions, c’est l’achat des options de vente qui lui permettra de limiter sa perte à un niveau plancher égal au prix de levée choisi.

Avant de commencer à utiliser les stratégies mentionnées dans le présent billet, nous vous suggérons de les mettre à l’essai dans le simulateur de négociation de la Bourse de Montréal.

Bonne négociation et bonne semaine!

 

Les stratégies décrites dans le présent blogue ne sont présentées qu’à des fins d’information et de formation. Elles ne doivent pas être interprétées comme étant des recommandations d’acheter ou de vendre quelque valeur mobilière que ce soit. Comme toujours, avant de mettre en œuvre des stratégies sur options, assurez-vous d’être à l’aise avec les scénarios proposés et d’être prêt à en assumer tous les risques.

[1] Le présent billet a été écrit le 30 juin 2020

[2] Pour en apprendre davantage sur la volatilité, veuillez consulter le billet intitulé « La volatilité en ces temps incertains : Comment en tirer avantage », publié le 26 mars 2020.

[3] La volatilité implicite est calculée à l’aide d’un algorithme basé sur un modèle d’évaluation des options tel que le modèle de Black-Sholes-Merton

[4] Ce pourcentage suppose que les rendements suivent une distribution normale, ce qui n’est pas toujours le cas. Plus l’échantillon qu’on utilise est grand, plus on s’approche de ce pourcentage. Avec un échantillon très petit, il est possible que ce pourcentage ne soit pas respecté.

Mettre le lien vers le webinaire, s.v.p.

Martin Noël
Martin Noël http://lesoptions.com/

Président

Corporation Financière Monetis

Martin Noël a obtenu un MBA en services financiers de l'UQÀM en 2003. La même année, il a reçu le Brevet de l'Institut des banquiers canadiens et la Médaille d'argent pour ses efforts remarquables dans le cadre du Programme de formation bancaire professionnelle. Monsieur Noël a commencé sa carrière dans le domaine des instruments dérivés en 1983 à titre de mainteneur de marché sur options, sur le parquet de la Bourse de Montréal, pour le compte de diverses firmes de courtage. Il a également occupé le poste de spécialiste sur options et, par la suite, de négociateur indépendant. En 1996, monsieur Noël est entré au service de la Bourse de Montréal à titre de responsable du marché des options où il a contribué au développement du marché canadien des options. En 2001, il a participé à la création de l'Institut des dérivés de la Bourse de Montréal où il a œuvré à titre de conseiller pédagogique. Depuis 2005, Martin est chargé de cours à l'UQÀM où il enseigne un cours sur les instruments dérivés au deuxième cycle. Depuis mai 2009, il est président à temps plein de la CORPORATION FINANCIÈRE MONÉTIS, une société active dans la négociation professionnelle et en communication financière. Martin agit comme collaborateur régulier en matière d’options pour la Bourse de Montréal.

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